La transformation du métier de journaliste
En France, le journalisme trouve ses origines au 17ème siècle, avec la création du journal La Gazette autorisée par le pouvoir royal. Il acquière peu à peu ses lettres de noblesse, notamment lors de la Révolution, tandis que les entreprises de presse structurent peu à peu leurs modèles économiques. L’émergence d’Internet au cours des deux dernières décennies ont entraîné des mutations importantes dans ces modèles, et dans le quotidien du métier de journaliste.
Le métier de journaliste
En France, est considéré comme journaliste toute personne rémunérée par une entreprise de presse pour rechercher, recueillir, vérifier et distribuer ensuite des informations sur un média (presse écrite, radio, journal…). Le journaliste peut être “généraliste” (il traite alors des types de sujet variés) ou “spécialisé” (il s’occupe alors d’un sujet précis : politique, économie, sport…).
On emploie parfois les termes “reporter” ou “grand reporter” pour un journaliste qui se déplace sur le terrain. Un éditorialiste est un journaliste qui donne son opinion dans un article ou une chronique spécifique. Dans la presse écrite, le journaliste est très souvent associé à un ou plusieurs secrétaires d’édition (ou secrétaires de rédaction) dont le métier consiste à relire et corriger les articles rédigés, parfois à trouver un titre “accrocheur”. D’autres métiers gravitent autour du journaliste : photographe, correspondant de presse, etc.
Pour obtenir la carte de presse, un professionnel doit démontrer que le journalisme constitue son activité principale.
Le métier de journaliste est défini dans le Code du travail (article 7111-3). En France, le journaliste est par ailleurs protégé par la loi du 29 juillet 1881 : celle-ci l’autorise notamment à refuser de signer un article. Elle assure également le secret de ses sources.
Un journaliste a des droits et des devoirs. Parmi les droits : celui d’enquêter librement sur tous les faits qui conditionnent la vie publique, de refuser toute subordination, d’être informée de toute décision affectant la vie de l’entreprise. Parmi les devoirs : celui de respecter la vérité, de respecter la vie privée des personnes, de ne jamais confondre le métier de journaliste avec celui de publicitaire ou de propagandiste.
Notons également que la Charte de Munich rappelle ces droits et ces devoirs. Toutes les entreprises de presse n’en sont cependant pas signataires.
Une transformation du contexte économique dans lequel évolue les journalistes
Au cours des dernières décennies, le contexte socio-économique dans lequel évoluent les journalistes a été bouleversé en profondeur. L’émergence d’internet a bousculé les pratiques traditionnelles des entreprises de presse et les a contraintes à remodeler leurs stratégies financières.
Pour ce qui concerne la presse écrite, un rapport publié en 2007 et rédigé par Marc Tessier – haut fonctionnaire et ancien président de France Télévision – relève que le nombre de points de vente a baissé et que les invendus se multiplient. Ce même rapport mentionne le fait que la presse écrite connaît actuellement un manque de rentabilité et de fonds propres, et ce malgré les aides publiques dont elle dispose. En cause notamment : la baisse de la lecture des journaux papier, les coûts fixes liés à l’impression et la baisse des recettes publicitaires avec la concurrence d’Internet.
Le rapport précise : “Les groupes de presse français, et plus particulièrement les journaux d’information politique et générale, se retrouvent ainsi, au creux de la vague et confrontés à un effet de ciseau. D’une part, ils voient leurs recettes tirées du support papier diminuer ou stagner et, d’autre part, ils doivent financer à la fois de nouveaux investissements pour se développer dans le numérique et les nouveaux médias mais aussi pour maintenir et renouveler leur offre papier (remplacement des rotatives existantes dans les imprimeries…).”
Cette baisse des moyens a dégradé les conditions de travail des journalistes. Nombre d’entre eux ont dû acquérir de nouvelles compétences indispensables pour s’adapter à la transformation digitale : rédaction d’articles pour Internet, réalisation et montage de vidéos ou encore enregistrement de podcasts. Ils ont dû également apprendre à maitriser les réseaux sociaux. Certains journaux proposent désormais des vidéos brèves adaptées à ces nouveaux formats. On peut noter par ailleurs que certains nouveaux médias sont apparus, surfant sur la popularité des réseaux sociaux. C’est le cas de Brut par exemple.
Il n’en demeure pas moins que la presse écrite reste actuellement dans un état préoccupant. Le ministère de la Culture faisait état en 2022 d’une situation complexe : baisse du nombre de quotidiens d’information générale, baisse de la valeur ajoutée des entreprises du secteur et précarisation des conditions de travail des journalistes (baisse de 12 % du nombre de journalistes en 10 ans). Et les mutations auxquelles ce secteur est confronté vont très probablement s’amplifier dans les années à venir.
Une amplification des bouleversements
L’Intelligence Artificielle va immanquablement secouer le monde du journalisme. Déjà, des expérimentations sont menées. Ainsi, plusieurs médias allemands ont d’ores et déjà décidé de coopérer avec Chat GPT. En France, c’est le journal L’Est républicain qui mène une expérience d’intégration de Chat GPT dans le processus de production de l’information. Selon certaines prévisions, 90 % des contenus en ligne pourraient être rédigées par une IA d’ici 2025… ce qui entraînera inévitablement une baisse drastique des effectifs au sein des entreprises de presse.
Notons que cette évolution ne concerne pas seulement la presse écrite : par exemple, le média koweïtien Kuwait News a dévoilé en avril 2023 une animatrice de télévision virtuelle, avec l’ambition de lui confier la présentation d’un journal d’actualité sur le compte X (anciennement Twitter) de la chaîne. De manière générale, l’IA va pousser une grande partie des salariés actuels à revoir leurs compétences d’ici peu.
Reste que dans beaucoup de cas, l’IA ne pourra pas remplacer l’humain. Ainsi, elle ne pourra pas mener une enquête approfondie, interroger des témoins ni recueillir des informations sur le terrain. Tout cela restera l’apanage de femmes et d’hommes formés aux métiers du journalismes, dont on peut penser qu’ils demeureront indispensables à terme, en particulier pour les médias d’investigation. Reste à savoir dans quel contexte économique ils évolueront.
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